29/10/2025
PARC LONGCHAMP
Pas de parking dans nos jardins
Le Palais Longchamp est inscrit dans la mémoire des Marseillais comme le
symbole de l’arrivée à Marseille des eaux de la Durance. Ouvrage monumental
réalisé entre 1850 et 1860 par Espérandieu et Montricher, il est aujourd’hui un des
rares lieux touristiques de la ville. Classé aux Monuments Historiques ainsi que
les jardins qui le jouxtent en 1999, il devrait de ce fait être protégé contre les
promoteurs. Pourtant aujourd’hui un projet de parking risque de le mutiler et de
transformer le dernier poumon vert du centre ville en aspirateur à voitures.
Le Parc Longchamp à Marseille, c’est sept hectares d’espaces verts en plein
centre ville. Pour mémoire, à Lyon, le Parc de la Tête d’Or en compte 117 ! C’est aussi
avec un million de visiteurs par an le parc le plus fréquenté de la Ville avec Borély. Il se
divise en deux parties : le « plateau », partie haute situé directement derrière le Palais
et l’ancien Jardin Zoologique situé entre le bd Cassini et le bd du Jardin Zoologique.
Fermé en 1985 pour diverses raisons, le zoo aurait dû normalement laisser place
à un espace public aménagé et protégé au même titre que la partie haute, d’autant que
ces 4 hectares occupés précédemment par le jardin botanique abritent des espèces
végétales rares et des arbres de haute tige classés « arbres vénérables » en raison de
leur âge et à préserver en priorité.
Historique
Dès 1993, la Ville commence à porter atteinte à cet espace préservé en créant
une aire de stationnement pour les municipaux. L’aqueduc qui enjambe le jardin est
fermé par des claustra et quelques centaines de m² sont ainsi fermés au public. Roland
Blum, député, s’en indigne et parle « d’aliénation de l’espace » et de « blessure
irréparable dans cet îlot de verdure qu’est le Jardin Zoologique ».
En 1995, face à l’inquiétude des riverains, Jean-Claude Gaudin et son premier
adjoint Renaud Muselier prennent l’engagement de respecter la zone verte et de faire
inscrire « le reclassement de la totalité du jardin zoologique en zone non
constructible ».
On lit alors dans le programme des élus : « Ce parc est l’unique poumon vert des
arrondissements du 3ème secteur… Nous proposerons sa réinscription en zone verte
lors de la prochaine révision du POS et ferons tout pour que ce site devienne le lieu de
rencontre privilégié des habitants ».
En 2000 lors de la révision du POS, les promesses sont loin, et c’est à l’arraché
après un nombre incalculable d’interventions auprès des élus, et un dossier déposé à la
Commission d’Enquête, que les riverains obtiennent une timide extension de la zone
verte dans un délaissé du jardin situé entre l’aqueduc et les bâtiments municipaux de
l’impasse Ricard Digne.
Le 10 octobre 2000 est présenté le Projet Grand Longchamp en Mairie de
3ème secteur : M. Gilles, maire de secteur, annonce la réalisation « d’un parking de 300
places au bas du Jardin Zoologique, sous le bâtiment de la Police des Parcs, et le
classement de la totalité du jardin en EBC ».
29 Le Livre Noir du Collectif « Laisse Béton »
Page 29
Le 18 février 2002 : nouvelle présentation du Projet Grand Longchamp, la Ville
annonce : « En 2004/2005, un parking de proximité de 360 places verra le jour sur un
emplacement réservé situé le long du bd du Jardin Zoologique ». Odile Blanc,
architecte du projet, émet des réserves et « rappelle la difficulté de proposer
l’implantation de nouveaux parkings alors que le P.D.U. s’oriente vers une forte
limitation des véhicules en centre ville ».
Sur les plans apparaissent 3 projets de parkings : le premier bd du Jardin
Zoologique à hauteur du métro, le deuxième sous la butte de l’Observatoire, le 3ème
bd de Montricher. Un 4ème est envisagé au début de la rue Kruger sur un terrain
appartenant à la SNCF. Par courrier en date du 11 février 2002, Mme Servant, Adjointe
aux Permis de Construire, confirme la réservation d’un terrain au bas du bd du Jardin
Zoologique, sous la Police des Parcs. Les riverains et les associations ayant donné un
accord de principe, une réunion d’information est prévue à une date ultérieure….
Un projet dévastateur
En février 2007 la réunion d’information promise en 2004 se fait attendre mais
dès novembre 2006 la société Q PARK a déposé une demande de permis de construire
pour un parking de 626 places à l’angle du bd Cassini et du bd du Jardin Zoologique .
Ce projet monté dans la plus grande opacité ne sera connu des riverains que
grâce à des indiscrétions : même au moment où l’affichage de l’autorisation de
construire est fait sur le terrain, il est impossible de joindre les responsables et de
consulter le dossier d’urbanisme. Il faudra de nombreux jours et d’innombrables
interventions pour que les documents soient visibles et révèlent l’étendu du désastre
programmé : il n’est plus question de réaliser de petits parkings de proximité bien
intégré au site mais de supprimer une partie de l’ancien Jardin Zoologique pour édifier
un méga parking de 600 places sur six niveaux et ce en plein cœur d’un site classé.
Ce projet entrainera la destruction immédiate de la couverture végétale de la
parcelle concernée : 22 arbres dont certains sont classés « arbres vénérables » en
raison de leur âge et de leur beauté. A terme c’est l’ensemble de la végétation du jardin
qui est menacée de « stress hydrique », en clair de mort prématurée par sécheresse.
Ce projet entrainera sur le site un afflux de véhicules estimé à 1500 par jour et
signera donc la disparition de la dernière parcelle de territoire marseillais encore
respirable dans la ville la plus polluée de France.
Sans parler de l’incidence sur les difficultés de circulation autour du site, ce projet
aura donc à très court terme un impact énorme sur la vie et la santé des marseillais : un
million de visiteurs viendront respirer les émanations nocives émises par les bouches
d’aération situées en surface.
Quatre ans de lutte
Depuis quatre ans maintenant les riverains soutenus par d’innombrables
sympathisants se battent contre ce projet aberrant.
Un premier recours déposé devant le tribunal administratif a été rejeté. L’appel
devant la cour administrative d’appel vient d’être rejeté également. Certains attendus du
tribunal sont surprenants mais on peut retenir que « la construction d’un équipement
public d’intérêt général sur le domaine public appartenant à la commune de Marseille
ne nécessite pas d’autre autorisation que le permis de construire…. »
30 Le Livre Noir du Collectif « Laisse Béton »
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On peut en ce cas se demander à quoi sert de voter la préservation de certains
sites qui comme Longchamp revêtent une importance historique, patrimoniale et
humaine inestimable si c’est pour ensuite les livrer aux promoteurs. Car dans ce projet
de parking il ne faut voir rien d’autre que la cession d’un patrimoine national à des
promoteurs privés en vue de réaliser un profit. Profit garanti car la remise en état des
lieux se fera aux frais du contribuable marseillais qui couvrira également le déficit
d’exploitation.
On constate en effet aujourd’hui que les 4ème et 5ème arrondissements proposent
une offre en matière de stationnement bien supérieure à la demande et sont en train de
devenir le principal aspirateur à voitures de la ville. Tous les parkings récemment
ouverts (Chave, Blancarde, Vallier, Proxipark de Sébastopol) peinent à trouver le client
et leur proximité n’a en rien résolu les problèmes de circulation et de stationnement très
importants dans ces quartiers centraux. Problèmes qui d’ailleurs ne semblent pas
préoccuper outre mesure les élus puisque le 3ème secteur tout entier est pris d’une
frénésie immobilière incontrôlable, et tant p*s si les immeubles construits sont en déficit
de parking avant même la pose de la première pierre.
Aujourd’hui après 25 ans d’indifférence, de laxisme et de manque d’entretien,
l’ancien Jardin Zoologique est dans un état déplorable : les pancartes annonçant un
danger sont plus nombreuses que les fleurs, un million de personnes y transitent,
jouant, dormant, se promenant, pique niquant sur place. Rien n’est prévu pour les
accueillir : pas d’eau, pas de sanitaires, pas de poste de secours. Pourtant le lieu ne
connait aucune désaffection : l’endroit reste cher aux cœurs des Marseillais d’autant
que pour beaucoup il est la seule résidence secondaire accessible, le seul lieu de
vacances, le seul îlot de verdure au milieu du béton. Pour nous, pour nos enfants, il est
donc important de le préserver et de le défendre.
Collectif sos.longchamp
parc-longchamp.org
[email protected]
https://www.millebabords.org/IMG/pdf/Livre_Noir_-_Laisse_Beton_1_.pdf