
09/10/2025
Laissez-moi vous parler d’un sujet récurrent ici : le biais de cognition.
C’est ce mécanisme très agaçant qui fait que… nous lisons les messages partiellement, notamment les mails.
C’est lui qui me fait perdre des heures chaque semaine à répéter les mêmes informations, jusqu’à ce que, parfois, vous réalisiez qu’elles étaient là depuis le début.
Et si c’est (très) agaçant à gérer — surtout quand on reçoit des centaines de mails par jour — c’est surtout dangereux pour notre capacité à comprendre et à intégrer les informations.
Et personne n’y échappe : nous sommes tous concernés.
Les biais cognitifs sont des raccourcis mentaux que notre cerveau utilise pour aller plus vite.
C’est pratique, oui.
Mais cela nous conduit souvent à des erreurs de jugement, sans même que nous nous en rendions compte.
Car plus le cerveau pense “savoir”, moins il cherche à remettre en question ce qu’il croit.
Quelques exemples concrets de biais cognitifs
1. Le biais de confirmation
On cherche ou retient surtout les informations qui confirment ce qu’on pense déjà.
Exemple : lors d’études sur la stérilisation, si l’on est convaincu qu’elle augmente l’espérance de vie, on va surtout lire les publications allant dans ce sens.
La vraie démarche scientifique serait de tout lire, d’analyser, puis de trancher.
Malheureusement, même certains “scientifiques” prêchent pour leur paroisse. La neutralité absolue est rare, car les intérêts économiques et cognitifs biaisent souvent la lecture des résultats et mettent des oeillères ...
L’objectivité demande un effort constant : lire aussi ce qui dérange et nuancer énormément à coup de "cela va dépendre."
2. L’effet de halo
Une impression générale influence notre jugement global.
Exemple : si Chris Pratt me parle du cyclotron, je serai captivée.
Si c’est John Rhys-Davies, probablement moins.
Le message ne change pas, mais notre perception, elle, est biaisée par l’image que nous avons de la personne.
Quelqu'un de plus "mature" physiquement va directement inspirer confiance, alors que la compétence n'a pas de lien direct avec l'âge ...
3. Le biais d’ancrage
La première information qu’on reçoit influence fortement notre jugement.
Elle reste ancrée longtemps, surtout si l’on manque de curiosité intellectuelle ou de distance critique. La première impression devient le point de référence – ou filtre — pour tout ce qui suit.
4. Le biais de disponibilité
On évalue la probabilité d’un événement selon la facilité avec laquelle on s’en souvient.
Exemple : après avoir vu de nombreux reportages ou publicités sur les croquettes “sans céréales ultra premium”, on a l’impression que ce sont les meilleures du marché.
Pourtant, cela reste souvent de l’ultra-transformé (comme toutes les croquettes).
Et si l’on veut vraiment comprendre, il faut aller plus loin : lire entre les lignes, examiner la composition, les analyses nutritionnelles, les aminogrammes (ah, mais ils ne sont pas disponibles… comme c’est étrange) et surtout avoir des études longitudinales sur l'utilisation de ces aliments.
Notre cerveau, lui, se contente de ce qui est visible et rassurant et vous êtes intimement convaincus que ce sont des "bonnes croquettes", sont forts quand même !
5. Le biais de statu quo
On préfère que les choses restent comme elles sont.
Changer coûte de l’énergie, de la réflexion, et demande une plasticité cérébrale.
Alors on conserve nos habitudes, même quand elles sont inefficaces ou dépassées.
C’est vrai dans les process, mais aussi dans la connaissance :
une personne qui ne change jamais de discours ne se remet pas en question.
La Vérité — si tant est qu’elle existe — n’est pas figée.
Elle se construit, se confronte, se réévalue à la lumière de nouveaux éléments et tout au long de notre vie.
En conclusion
Les biais cognitifs nous font gagner du temps… mais souvent au détriment de la véritable compréhension.
Ils nous poussent à zapper, à simplifier, à filtrer — bref, à croire qu’on a lu ou compris, alors qu’on n’a fait que survoler.
Et dans un monde saturé de formats courts et de stimulations constantes, tout nous pousse à aller toujours plus vite.
Pourtant, il faut apprendre à ralentir, relire, questionner, si l’on veut garder la maîtrise — et ne pas devenir simple spectateur de nos automatismes.
Alors, la prochaine fois que vous ouvrirez un mail, un rapport ou une étude : lisez vraiment.
L’information que vous cherchez s’y trouve peut-être depuis le début…(et cela me fera, au passage, gagner quelques précieuses heures).