27/02/2025
LA SOURCE DES ABOIEMENTS
Ou la condition sine qua none pour pouvoir les apaiser.
Je dis « apaiser » parce qu’il est impensable de demander à un chien de ne plus aboyer. Je vous rappelle alors mon arrêt favori du Conseil d’Etat, celui de la commune française de Mougins mentionné dans mon premier livre, et rejeté par la plus haute cour administrative.
« … S’il appartenait au maire de Mougins d’user de ses pouvoirs de police pour prendre des mesures propres à assurer la tranquillité publique, il ne pouvait légalement décider d’une façon générale et absolue, comme il l’a fait dans l’alinéa 2 susvisé, que seront réprimés les aboiements et les hurlements de chiens de garde (…) que la commune requérante n’est, dès lors, pas fondée à soutenir que … »
Bref, ça c’est juste pour poser les bases.
Mais d’un autre côté, il n’est pas possible de laisser un chien aboyer sans limite. Pour autant, les dispositifs anti-aboiements type colliers électriques, à jet de citronnelle et autres horreurs toujours en vente libre sont à bannir. Ce sont des outils de maltraitance directe qui font souffrir les chiens, sont dangereux en raison des agressions redirigées qu'ils provoquent et enfin, donnent une image absolument déplorable à la personne qui décide de l’employer pour son propre chien. Mieux vaut essayer de le comprendre non ?
MAIS POURQUOI MON CHIEN ABOIE-T-IL ?
>>> Quid de la génétique.
Certaines races de chiens aboient beaucoup plus que d’autres. Et à l’intérieur des races elles-mêmes, certaines lignées vont aboyer encore plus. Si l’on adopte un chien de type garde ou de type terrier (par exemple), il faudra s’attendre à ce que ces chiens se fassent régulièrement entendre. Ces races ont en effet été sélectionnées par l’homme pour servir de vigie, donner l’alerte, localiser précisément la proie dans les terriers par leurs aboiements sonores et convaincants. La sélection artificielle a donné au chien des compétences innées qui ne disparaîtront pas de sitôt. Nous n’arrêteront jamais de le dire, avant de jeter votre dévolu sur une race, il est vraiment souhaitable de vous renseigner sur ses compétences ancestrales. Une fois cette question résolue, cela ne veut pas dire qu’il ne faudra rien faire avec les aboiements de votre chien. Le reste de l’article vous renseignera mais déjà, comprendre la génétique d’un chien permet souvent de faire preuve de plus d’indulgence. Sur cette question des compétences originelles, je vous renvoie à mon article « Allons aux origines nous rafraîchir la mémoire » : https://shorturl.at/N1j4c
>>> Quid de l’activité.
Le chien n’aime pas s’ennuyer. Et aucune race de chien n’aime ça. Le chien est un animal actif, qui bouge et s’exprime. S’il ne sait pas quoi faire de ses journées, si ses besoins génétiques (patrons-moteurs) et personnels (motivations, intentions) ne sont pas compris et respectés, le chien peut aboyer des heures, sans se fatiguer. L’activité de vocalisation est pour lui une activité comme une autre qui doit immédiatement nous amener à nous poser cette question : quel manque mon chien est-il en train de compenser par autant d’aboiements ? Sort-il suffisamment ? Ses sorties sont-elles qualitatives ? Les activités masticatoires alimentaires et non alimentaires sont-elles satisfaisantes ? Ses envies d’interaction sociales sont-ils comblées ? Etc.
>>> Quid de la joie et de l’impatience.
Joie, excitation, aboiements, montée de l’excitation, impatience, sauts, aboiements, tentatives de redirection de la morsure ou morsure des mains, de la laisse qui n’arrive pas assez vite, des manches, aboiements, aboiements… lors de la sortie quotidienne, quand quelqu’un arrive à la maison, quand le repas se prépare… Vous vous y voyez ? Si oui, la difficulté de votre chien est de ne pas réussir à calmer sa joie et son impatience ;-) Ici, nous optons pour la gestion environnementale.
- Si votre chien n’est pas encore prêt à gérer la joie immense qu’il ressent quand un invité arrive chez vous, c’est un leurre de penser que ça lui viendra tout seul, en répétant ce contexte d’échec. Éloignez-le avec de la mastication ou du léchage. Il pourra bien sûr entendre et voir vos invités qui seront bien avisés de l’ignorer (pour l’aider). Quand tout le monde sera assis et calme, votre chien pourra venir saluer vos gens. Vous l'aurez ainsi mis en condition de mieux accueillir sa joie grâce à la distance et au décalage dans le temps. C'est la répétition de cette expérience là qui lui permettra d'apprendre à rester plus calme dans la joie.
- Si votre chien explose de joie au moment de la sortie, s'il aboie beaucoup d’impatience et redirige sur vous, ce n’est pas un scoop que de vous dire que la patience se travaille, avec patience et indulgence. Ici, on opte pour le langage non verbal et la redirection dans un tug, pour ne pas rajouter du blabla à un contexte déjà sonore et agité. Immobilité, lâcher de la laisse, reprise de la laisse quand votre chien est plus calme… Votre chien va vite comprendre (si vous faites ce qu’il faut) que c’est son silence et sa petite joie qui fera avancer les événements, pas son impatience et ses débordements.
>>> Quid de la relation, de la sécurisation.
Pas de problème à ce qu’un chien de garde aboie. Il commencera d’ailleurs à le faire très tôt. Faire son job en vous alarmant, ça, vous n’aurez pas besoin de lui apprendre. Par contre, il est essentiel de lui faire comprendre très tôt que les aboiements doivent cesser quand vous sortez vérifier ce qui se passe. Vous reprendrez ainsi la charge de la garde. Vous resterez calme en allant voir votre chien, et vous le rassurerez en lui disant « Tout va bien, merci, c’est tout. ». Et vous le ferez rentrer chez lui. Un chien de garde doit être sécurisé par son gardien. Un chien de garde n’est pas autonome. Il est votre auxiliaire dans ce travail. Tant p*s si vous êtes en pyjama ou bien installé dans votre canapé. Il n’est pas souhaitable de le laisser aboyer, ou d’ouvrir la fenêtre en vociférant « Stoooooooooop ». Votre maîtrise de la situation est importante durant la première année de votre chien de garde. Voyant votre calme olympien et sentant votre rassurance, votre chien de garde sera bien sécurisé. Il se dira qu’il est entre de bonnes mains, et il évitera ainsi de prendre toute la responsabilité d’une garde pour laquelle il n’est pas prêt.
>>> L’aboiement venu des tréfonds de son âme.
Votre chien aboie rarement mais parfois, il pousse un aboiement incroyablement explosif et sonore, à vous faire avoir un infarctus. Son aboiement va crescendo, avec piloérection en prime. Votre chien tourne en rond, vient vous voir, gémit et repart. Il est difficile à calmer. Mais quelle mouche l’a piqué ? Il a en fait entendu un bruit qui lui fait peur et le met en colère. Il ne peut pas mettre d’élément visuel sur ce bruit qu’il a entendu au loin. Cette impossibilité d’identifier ce bruit étrange le frustre beaucoup et fait monter sa colère. Rassurez-le. Restez calme. Dites-lui que tout va bien. Donnez-lui quelque chose à lécher ou à mâchouiller.
>>> La réactivité, proactivité.
Votre chien aboie en avançant ou en sautant vers les gens, certains objets, les vélos, les joggeurs, les autres chiens… Il est proactif, hyper-réactif en mode « Je n’en suis plus à tendre l’autre joue. Je suis en colère, et je ne sais plus comment faire autrement pour m’adapter ». Une étude sérieuse et une prise en charge personnalisée s’imposent. Contactez-moi sur [email protected]
Audrey Ventura / Cynoconsult
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