25/06/2021
L'EMPILEMENT DES DÉCLENCHEURS
Selon leur génétique, leur tempérament, leurs expériences, l’environnement dans lequel ils grandissent (et d’autres facteurs), les chiens sont plus ou moins sensibles au stress. Cependant, ils sont tous susceptibles de saturer; de subir un stress trop important pour garder le contrôle face à un événement stressant. Le phénomène d'empilement des déclencheurs est une part importante des problèmes de sur-réactivité de nos animaux. Il est donc essentiel de la comprendre.
➡️ La goutte d'eau qui fait déborder le vase
C’est un phénomène qui se produit chez les chiens comme les humains. C’est le fait d’encaisser, jusqu’au moment où ce n’est plus possible – ce qui nous fait réagir d’une façon ou d’une autre. D’où la fameuse expression “c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase”.
Nous risquons tous d’exploser si nous faisons face à un enchaînement d’événements stressants. C’est la même chose pour les chiens.
➡️ Qu'est ce qu'il se passe ?
Lorsqu’un individu est stimulé par quelque chose dans son environnement, une réponse de stress se produit (le stress n'est pas forcément 'négatif'; il est nécessaire à la mise en action). Pour faire simple: lorsque l'individu perçoit les stimuli déclencheurs, le corps sécrète des substances qui lui permettent de réagir pour gérer la situation – par exemple, pour activer une réponse de fuite face à un danger. L'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA), impliqué dans la régulation des réponses neuroendocriniennes au stress est activé. Ce déclenche notamment la production du cortisol «l'hormone de stress». Son rôle est d’aider l’organisme à faire face à un événement stressant, en mobilisant l’énergie nécessaire pour nourrir les muscles, le cerveau, mais aussi réguler la pression artérielle. Ses niveaux augmentent à chaque événement stressant et ils s’abaissent progressivement lorsque l’individu n’est plus en situation stressante (c’est la phase de relâchement).
Si des événements stressants sont trop rapprochés dans la durée, l'axe HPA sera répétitivement activité, ce qui poussera le chien au-dessus de ce qu’on peut visualiser comme un seuil de tolérance au stress (ou de réactivité) – qui génère des réactions rapides, de forte intensité, souvent automatisées. Même des évènements habituellement peu stressants peuvent déclencher une forte réactivité suite à un enchainement d'expériences plus ou moins stressantes.
➡️ Chaque chien fonctionne différemment
– Ce qui stresse un animal n’en stresse pas forcément un autre.
– L’intensité du déclencheur n’est pas la même pour tous. Un chien peut très bien tolérer un déclencheur à 50 mètres et un autre se mettra dans tous ses états à la vue du même déclencheur à la même distance.
– La tolérance au stress varie selon les individus; certains sont beaucoup plus résilients que d’autres, comme chez les humains. Certains ont un seuil de tolérance relativement bas. Ce qui fait que chaque chien est unique dans sa façon de percevoir et réagir face aux stimuli environnementaux.
Ce sont des choses qu’il faut apprendre à connaître en observant l’animal – c’est une part importante du travail lorsqu’on aide les chiens dits "réactifs" ou les chiens peureux. Jusqu'à quel point encaissera t'il? Quand faut-il s'arrêter pour éviter les échecs? Ce sont des questions qu'il faut constamment se poser dans ce travail.
➡️ Les déclencheurs insoupçonnés
Ce sont des stimuli, qui isolés, ne déclenchent pas de réaction notable. Un oiseau qui s’envole, un passant avec une démarche étrange, une personne avec un chapeau, un enfant qui court en poussant un cri, le bruit d’un hélicoptère au dessus de vos têtes, un jogger… Votre chien n’a peut-être jamais montré de signes de stress face à ces stimuli, mais cela ne veut pas dire qu’il n’y est pas sensible. D’ailleurs, tout ce qui se produit soudainement peut générer un stress, plus ou moins important, même s’il n’y a pas de danger.
Si votre chien est parfaitement détendu et qu’une moto bruyante passe à côté de lui en début de promenade, cela ne déclenchera probablement pas de réaction. Mais si cela se produit en fin de balade, après avoir croisé des chiens qui ont aboyé derrière des portails, après avoir vu beaucoup de voiture passer à côté de lui, après avoir marché sur une plaque d'égout qui lui fait peur, après avoir senti des odeurs étranges… Alors là, une moto qui passe à côté de lui risque de déclencher une réaction (ex: aboiement) – parce que tous ces événements ont possiblement créé un empilement des déclencheurs (du stress). Et vous l'aurez certainement compris, tous les sens perçoivent des stimuli, ce qui peut faire beaucoup d'informations à traiter. Ce qui peut aussi provoquer une saturation mentale réduisant l'attention et impactant l'apprentissage.
➡️ Pensez toujours à l'empilement des déclencheurs
Il est particulièrement important de faire attention à ce phénomène quand on travaille avec un chien qui est sensibilisé à certains stimuli (congénères, voitures...) ou un chien très sensible. Non seulement il faut prendre en compte le nombre de déclencheurs auquel sera exposé le chien, mais aussi tous les stimuli environnementaux que le chien devra trier et analyser. Prendre en compte cette notion d’empilement des déclencheurs peut éviter de sensibiliser encore plus l'animal.