
30/05/2025
Ce printemps/été, nous allons vous présenter une petite série sur les idées reçues que l'on retrouve dans le milieu équin 😊
Ces posts seront inspirés de questions ou d'affirmations que nous recevons très souvent et qui méritent un peu d'attention (muscler son cheval au travail, donner du mash, déterminer les carences via une analyse de sang, etc.).
S'il y a des choses que vous entendez souvent et pour lesquelles vous aimeriez des précisions, savoir si c'est vrai ou faux (ou ni l'un ni l'autre), n'hésitez pas à nous en faire part en commentaire, nous essaierons d'y répondre !
🌾 Très souvent, nous entendons qu'un cheval en surpoids sera mis à l'herbe quand elle sera haute, car elle sera beaucoup moins riche que de l'herbe courte ou rase.
Est-ce une vérité ? Est-ce qu'un pré d'herbe haute sera moins riche et moins problématique qu'un pré d'une surface équivalente mais dont l'herbe serait rase ?
L’herbe rase, surtout en période de stress (gel, sécheresse, surpâturage, etc.), accumule souvent plus de sucres, notamment des fructanes, que l’herbe haute.
🔎 Sucres et fructanes :
Les fructanes sont une forme de glucides de réserves de certaines plantes. Ils sont stockés dans les tiges, principalement à la base de la plante.
La capacité à accumuler le fructane varie selon les espèces. Parmi les plus riches à même d’accumuler des fructanes : ray-grass anglais, fléole des prés, fétuque élevée, dactyle pelotonné…
🔎 Pourquoi les fructanes peuvent-ils poser un problème ?
Les chevaux ne digèrent pas directement les fructanes car ils ne possèdent pas les enzymes nécessaires pour le faire. Ces sucres seront donc directement pris en charge/fermentés par la flore du gros intestin 🦠
Un excès de fermentation des fructanes, et des sucres de manière générale, peut provoquer une chute du pH (acidose) dans le gros intestin et entraîner un déséquilibre de la flore digestive. Cela peut conduire à des troubles digestifs tels que des coliques, des fourbures, et d’autres complications.
🔎 Quelles variations des fructanes dans l’herbe ?
🕒 Au cours de la journée :
Sous l’effet du soleil, la plante produit des sucres via la photosynthèse. En fin d’après-midi, les réserves en sucres sont maximales. La nuit, la plante stoppe la photosynthèse mais utilise ses réserves en sucres pour réaliser sa croissance. Le matin, les stocks de sucres sont donc bas.
❄️ Froid + soleil ☀️
Par temps froid mais ensoleillé, la photosynthèse continue mais la croissance ralentit. La plante accumule donc les sucres qu’elle n’utilise pas ou peu pour sa croissance.
🌡 Sécheresse :
Le même principe s’applique : la photosynthèse continue mais la croissance est ralentie par le stress hydrique, ce qui provoque une accumulation de fructanes dans la plante.
🐴 En surpâturage :
En surpâturage, la plante est constamment broutée, ce qui limite sa capacité à croître normalement mais la photosynthèse a quand même lieu. Comme les sucres ne sont pas utilisés pour la croissance, ils s’accumulent, principalement sous forme de fructanes, à la base de la tige.
🌱 Selon le stade de croissance :
Avant l’épiaison, la plante stocke des sucres et des fructanes dans les tiges et les feuilles. Au moment de l’épiaison, les sucres sont utilisés pour former le grain, rendant la tige plus fibreuse et moins riche en sucres solubles, d'où le fait qu'une herbe haute et épiée est considérée comme moins riche en sucre qu'une herbe rase.
➡️ En résumé : Une herbe rase, surtout en situation de stress, peut contenir autant, voire plus de sucres (notamment de fructanes) que de l’herbe haute. Ainsi, manger moins d’herbe ne signifie pas forcément consommer moins de sucres. De plus, la teneur en fructanes varie considérablement selon l’heure de la journée, les conditions climatiques, le type de sol et le stade de croissance de la plante.
➡️ Cependant, il est essentiel de considérer la quantité totale d’herbe ingérée ! Dans certains cas, notamment chez les chevaux ou poneys présentant des troubles métaboliques ou tout simplement un très bon appétit, la sensation de satiété peut être altérée. Ils peuvent alors consommer de très grandes quantités d’herbe haute. Même si cette herbe est relativement pauvre en sucres, le volume ingéré peut conduire à un apport total en sucres très élevé, et parfois bien plus élevé que ce qu'ils auraient consommé sur une herbe rase, où la quantité à consommer est plus limitée et nécessite plus de déplacement et de temps.
On retrouve également des plantes à des stades différents dans une pâture : les chevaux ont tendance à pâturer ras, donc à délaisser les herbes hautes pour aller à leur base et y trouver des herbes plus courtes, plus jeunes et plus sucrées.
⚠️Attention donc aux idées reçues : mettre son cheval en surpoids (ou pour qui il est nécessaire de limiter l'apport en énergie/protéines) dans un pré d'herbe haute n'est en aucun cas une sécurité car si 1cm d'herbe haute est en général moins riche en sucre qu'1cm d'herbe rase, il pourra en consommer de bien plus grandes quantités facilement, et donc consommer autant voir plus sucre que s'il avait accès à de plus petites quantités d'herbe !
Les excès en sucre, protéines, minéraux problématiques en excès (dont fer et manganèse) sont donc exacerbés par la quantité.
C’est là que le panier de pâturage devient un outil utile pour limiter l’ingestion sans supprimer l’accès au pâturage, mais également pour conserver une vie "normale", sans tomber dans un fonctionnement intenable pour les gardiens d'équidés, à les sortir ou les rentrer parfois à des heures impossibles et à y laisser sa propre santé (d'autant qu'en été, les chevaux ont tendance à manger beaucoup plus la nuit qu'en journée).